9 mai 2025

Mise en contexte à la veille du Sommet de l’économie sociale et de la journée de l’AGRTQ  

L’objectif d’atteindre 20 % de logements sociaux et sans but lucratif est un objectif partagé par tout le milieu communautaire.

À la veille du Sommet sur l’économie sociale et de la journée de l’Association des groupes techniques du Québec (AGRTQ), la FROHME juge important de rappeler que pour atteindre cet objectif essentiel, les partenaires de l’habitation communautaire doivent s’unir afin d’obtenir des augmentations importantes des investissements publics, prévisibles à long terme, dans le développement du logement social et sans but lucratif.  

Actuellement, les gouvernements du Québec et du Canada financent le marché privé quatre à cinq fois plus que le logement social et hors marché au détriment du droit au logement, de la santé de nos communautés et de l’économie du Québec. Nous devons également convaincre les décideurs de transformer les politiques et investissements publics en habitation pour atteindre notre objectif commun. 

La transformation et l’évolution du secteur peuvent contribuer à notre objectif, mais elles ne pourront pas se substituer à des investissements importants de l’État.

Services de mutualisation des besoins

La FROHME permet, depuis 25 ans, la mutualisation des besoins entre les OSBL d’habitation en offrant des services professionnels. Nous assurons la gestion de plus de 45 immeubles dans 30 OSBL, lesquels possèdent plus de 700 logements répartis sur un vaste territoire.

Depuis cinq ans, la FROHME encourage et soutient gratuitement les OSBL d’habitation souhaitant fusionner. Nous y voyons comme avantage principal la capacité pour ces organismes de disposer d’un nombre suffisant d’unités de logement pour permettre la présence de personnel à temps plein, afin d’assurer, principalement, l’entretien préventif et le maintien de leur parc immobilier. C’est le principal défi auquel les organismes d’habitation sans but lucratif seront confrontés dans les années à venir : rénover leurs immeubles sans faire exploser le coût des loyers de leurs locataires. La fusion permettra également des réductions de dépenses administratives qui pourront et devront être réinvesties dans la pérennité des immeubles, mais ce sont des gains marginaux.

Nous avons réussi à unir trois OSBL d’habitation pour créer les Habitations communautaires de la Montérégie Ouest. À l’est, nous travaillons activement à la mise en place, pour le 1er janvier 2026, des Habitations communautaires des Montérégiennes, qui pourraient regrouper trois OSBL d’habitation. Ces organismes continueront dans l’avenir d’accueillir de nouveaux OSBL d’habitation souhaitant se joindre à eux. La FROHME encouragera ses membres en Montérégie à rejoindre ces deux corporations ou à créer d’autres structures fusionnées.

 

Des fusions complexes

L’expérience des cinq dernières années nous a démontré que la fusion d’OSBL d’habitation est beaucoup plus complexe que prévu. Une partie de ces OSBL se trouvent dans des communautés semi-rurales, éloignées des grands centres urbains. Ils ont été développés, administrés, rénovés et entretenus par des bénévoles qui s’impliquent avec rigueur et professionnalisme quelques heures par semaine. Elles et ils sont travailleuses-eurs, souvent entrepreneur-e-s, avocat-e-s, comptables ou encore retraité-e-s. Très souvent, ce sont des anciens maires, anciennes mairesses. L’immeuble de l’OSBL est un outil essentiel pour améliorer la qualité de vie dans leur communauté. La perte de contrôle sur cet actif collectif est une source d’inquiétude, et nous ne pouvons être insensibles à cette réalité. Faire le parallèle avec les fusions des offices habitations, c’est nier l’implication réelle de ces bénévoles et des locataires dans leur milieu.

Dans des régions rurales et éloignées, l’immeuble d’un OSBL d’habitation est le seul à offrir des logements. Le financement pour des projets dans des petites communautés, des quartiers urbains, émanant des groupes communautaires et des citoyens qui souhaitent développer des projets avec une forte implication de la communauté, doit se poursuivre.

 

Un financement précaire

Notre expérience des cinq dernières années nous a également démontré que développer des unités de logement hors marché en comptant uniquement sur l’équité des immeubles est plus facile à dire qu’à faire. Nous comptons 1200 logements OSBL non conventionnés en Montérégie et, sans hypothèque, ce parc de logements pourrait théoriquement nous permettre de développer 300 nouvelles unités de logement hors marché, lesquels seraient inabordables au moment de la livraison des projets. Ce chiffre reste peu, comparativement aux besoins immenses. Ces OSBL d’habitation ont une marge de manœuvre parce qu’ils ont été développés dans le cadre de programmes de la SCHL durant les années 80. Ils ont bénéficié de subventions fédérales pour leur rénovation, jusqu’au début des années 2010. 

Concernant les 38 000 unités construites depuis 1997 grâce au programme Accès-Logis, la capacité de refinancement à court et moyen terme pour assurer le financement du développement est pratiquement nulle. Le programme prévoit, sur 35 ans, 10 500 $ par unité de logement pour la rénovation des immeubles, un montant à peine suffisant pour refaire une salle de bain dont la durée de vie est de 20 ans. Durant ce temps, il faudra remplacer les fenêtres, la toiture, les planchers, repeindre les aires communes, refaire le resurfaçage des stationnements et probablement le revêtement extérieur. Les cuisines en mélamine de ces logements ne durent pas 35 ans non plus. La faible capacité de refinancement de ces immeubles devra servir principalement à assurer la pérennité de ces logements et de leur mission, qui est d’offrir des logements sociaux de qualité.

Face à l’urgence de la crise du logement, il est crucial que le secteur se mobilise et ne reste pas silencieux face à la réduction des dépenses pour la construction de logements sociaux et hors marché en proportion des autres dépenses des gouvernements fédéral et provincial et du financement au marché privé. Cette réduction constitue le principal obstacle au développement.  

 

Une priorité à ne pas oublier

La consolidation et les fusions doivent être soutenue et encouragé dans le respect des communautés et cela ne constitue pas la principale solution à la crise du logement. Au-delà des slogans, des stratégies de communications et des relations publiques, la démonstration financière qu’un exercice majeur de consolidation et de fusions nous permettra d’atteindre notre objectif 20 % de logements sociaux et sans but lucratif reste à démontrer.  

Ce que le passé nous a cependant démontré, c’est que du financement public adéquat nous aura permis de construire 95 000 unités de logement sociaux au Québec entre 1970 et 1994 avec, entre autres, le soutien de plusieurs petits OSBL d’habitation dans les villages et communautés partout au Québec. En contrepartie, depuis 1997, nous avons construit moins de 50 000 unités. Il est donc important de se concentrer sur les bonnes priorités.